Cours Pasteur

Nous vous ferons grâce ici de la vie et de l’œuvre de Louis Pasteur : la génération spontanée, la rage, la vaccination, tout ça tout ça. La Ville de Bordeaux, comme beaucoup d’autres, lui consacre une rue, un cours même … peut-être en reconnaissance des paroles du bon Louis qui en 1866 définit le vin comme « un aliment qui peut être à bon droit considéré comme la plus saine, la plus hygiénique des boissons » (Claude Evin disapproves this message).

Le Cours Pasteur est donc une large artère reliant le Musée d’Aquitaine à la Place de la Victoire et qui affiche plusieurs visages le long des rails du tramway qu’elle accueille.

Nous commençons l’exploration dans les anciens « fossés des tanneurs ». Cette partie du cours, à deux pas de la Cathédrale, accueille des immeubles cossus époque Louis XVI. L’ensemble est chic et regroupe l’essentiel des commerces nécessaires à une vie heureuse : un magasin de farces et attrapes, des agences immobilières, un tatoueur, des restaurants, un sex-shop, des épiceries. C’est d’ailleurs dans une épicerie que l’on rencontre Ali, qui nous confirme qu’ici « la vie est tranquille et les filles sont jolies ». Il nous apprend aussi que nous nous sommes trompés, « Bordeaux ce n’est pas 2066 mais 33000 ». Et personne ne nous l’avait encore dit : Ali nous laisse baba sur ce coup là.

Le tram, élément central du cours

Le tram, élément central du cours

Commerces locaux 1

Commerces locaux 2

Commerces locaux

Cette partie du cours vit autour du Musée d’Aquitaine et de sa station de tramway éponyme. D’abord couvent, le bâtiment fut ensuite remanié et transformé pour devenir en 1838 la faculté des lettres et des sciences. Elle accueillit notamment Camille Jullian, ou Emile Durkheim mais également Annie et François, qui y vécurent Mai 1968 où la fac avait été cernée par les CRS, bien avant de mettre au monde un membre de Bordeaux 2066. Ils se souviennent déjà à l’époque d’un certain clivage entre les étudiants en lettres, plutôt à gauche, qui avaient leurs quartiers dans un bar de la rue Duffour-Dubergier voisine, et les étudiants en droit, moins portés sur la révolution, qui fréquentaient la brasserie « Le New York », qui existe toujours.

Depuis 1987 la faculté est devenue un musée d’histoire régionale (comprenant une exposition permanente et gratuite retraçant l’histoire de Bordeaux et de l’Aquitaine de la Préhistoire à nos jours, ainsi que des expositions temporaires) et l’on ne doute pas une seconde qu’une salle dédiée à l’œuvre de Bordeaux 2066 y sera bientôt installée.

Le futur musée Bordeaux 2066

Le futur musée Bordeaux 2066

En attendant notre entrée dans l’Histoire, il faut continuer le cours de notre cours. Un croisement assez sauvage entre le cours Pasteur, le cours Victor Hugo, la rue de Cursol et la rue Paul Louis Lande fait office de frontière … A l’angle il y a la mythique brasserie du Palatium qui a fêté cette année ses 100 ans, puis nous entrons dans la deuxième partie de notre voirie. Percé en 1903, ce prolongement du cours rassemble des immeubles de style art nouveau, qui en imposent avec leur gabarit homogène et leurs pierres blondes ou noires, selon la date du dernier ravalement. Au milieu, une église se glisse entre deux immeubles : il s’agit de la chapelle de la Madeleine, dernier vestige du couvent du même nom fondé en 1641. Le jour de notre passage l’église était fermée, nous n’en saurons donc pas plus sur l’église et son fondateur le Père Guillaume-Joseph Chaminade. Par contre à quelques mètres de là l’hôtel de la Madeleine est lui bien ouvert.

Francis nous accueille dans l’établissement et nous donne son avis sur la rue, la vie, la situation actuelle, la politique municipale etc. Pour faire court, « Bordeaux est un camembert et ici on est dans la partie qui pue »… En parlant de fromage non pasteurisé, Francis veut nous dire que l’arrivée du tramway et l’embellissement de la ville profitent à beaucoup, mais que tout cela a plutôt nui au Cours Pasteur. Pourquoi ? Parce que tout le monde s’arrête Place de la Victoire ou Place Pey Berland, mais plus personne ne passe à pied Cours Pasteur. Le tram y roule vite, ce qui rend difficiles les nuits des touristes, surtout quand pour changer la moindre fenêtre il faut l’autorisation de l’Unesco. Impossible de stationner également, au point que beaucoup d’artisans refusent purement et simplement d’intervenir Cours Pasteur, ou alors incluent une ligne « amendes » dans le devis. Autant dire que Cours Pasteur, on a la rage ! Un tramway qui n’est donc pas vraiment nommé désir pour Francis, mais malgré tout notre hôtelier continue et s’accroche parce qu’il aime son métier. Pas l’hôtellerie comme dans les chaînes, non non la vraie, celle qui va « de mettre du papier pour le cul dans les chambres jusqu’à faire toute la comptabilité ». Mais du coup à cause d’Attila (petit surnom du tramway ici), l’Hôtel de la Madeleine a changé sa cible, et n’a désormais plus d’étoile. La nuitée y coûte 45 €, ce qui est relativement imbattable dans l’hyper-centre. Touristes « sac à dos », étudiants qui passent des concours, durs de la feuille et hébergements d’urgence envoyés par le Conseil Général constituent désormais la majeure partie de la clientèle de cet hôtel qui malgré tout tient bon depuis 1910 !

Francis de la Madeleine

Francis de la Madeleine

Synagogue et temple de la consommation

Synagogue et temple de la consommation

On ressort de cette discussion un peu sonné … et l’on constate comme nous l’a indiqué Francis que plusieurs rideaux de fer sont durablement tirés. Même les célèbres prostituées du Cours Pasteur ont plié bagage suite aux travaux du tramway, à part une ou deux qui ont conservé leur clientèle « fidèle ». Pour retrouver de l’activité il vaut mieux être une grande enseigne ou alors se rapprocher de la Victoire et de son arrêt de tram.

C’est là-bas que Vincent a décidé d’ouvrir sa librairie Psy’k et Déclik spécialisée en psychologie, psychanalyse … de bonnes lectures pour les étudiants voisins de Bordeaux 2. Arrivé à Bordeaux depuis peu, Vincent ne peut pas nous dire grand chose sur la rue, par contre il confirme sans mal « qu’entre Bordeaux et Paris il n’y a pas photo : ici la qualité de vie est meilleure, tout est moins cher, on a la plage, la campagne, le bonheur quoi ». Certes ça n’a aucun rapport avec le Cours Pasteur mais ça fait toujours plaisir.

Vincent, qui non non n'est pas sourd.

Vincent, qui non non n’est pas sourd.

La nuit commence à tomber, il est donc grand temps de trouver un bar. Heureusement à quelques mètres de la fin du cours nous trouvons l’International Café. Ici c’est Richard qui nous accueille. Un sacré bonhomme le Richard : grand amateur de rock et de culture asiatique, ancien militaire, il a ensuite dirigé une auto-école, puis trois agences de voyages, puis un internet café qu’il vient justement de reconvertir en bar. En businessman averti Richard pense en effet « qu’internet tout le monde l’a sur son téléphone maintenant, alors que boire un coup ça fonctionne toujours ». C’est d’ailleurs ce que nous faisons avec sa bière « luxe »  tout en discutant du quartier et de la vie en général … On apprend d’ailleurs que Richard a une autre casquette : il est taxi la nuit et le matin car il aime ses clients. Pour ceux qui sont intéressés par un voyage à Helsinki pour 1 040 € ou encore à Bourg en Bresse pour 201 €, n’hésitez pas à consulter son site internet.

Bières luxes et taxi richard

Bières luxe et Taxi Richard

Richard avec un membre anonyme de Bordeaux 2066

De notre côté, c’est à pieds et en vélo que nous repartons, mais surtout dans la nuit noire. Car oui les jours sont de plus en plus courts, Pasteur, et l’heure d’hiver va désormais compliquer notre mission… Mais ne vous inquiétez pas, on continuera à explorer aléatoirement des rues, mais pas à ct’heure.

Adishatz les amis.

Bonus : pour nos lecteurs fumeurs, voici les conseils de Richard pour en finir avec la cigarette.